Touchant 1 enfant sur 5 (d’après la Fondation du Dr. Julien), les troubles du comportement représentent un des motifs de consultation les plus fréquents en psychiatrie. Ils sont quatre fois plus fréquents chez les garçons que chez les filles, apparaissant en moyenne vers 7 ans pour les individus de sexe masculin, contre 13 ans chez les individus de sexe féminin.
Dans la mesure où ils sont fréquemment associés à une forme de neuroatypie telle que le TDA/H comme nous le verrons plus loin, nous avons trouvé pertinent d’étudier ces formes de troubles.
Dans cet article, nous commencerons par présenter les principaux troubles du comportement, leurs causes et symptômes, avant de passer en revue les moyens de prise en charge listés à ce jour, pour soulager le quotidien du patient et de son entourage.
Note : Nous proposons ici un regard croisé construit à partir de plusieurs études scientifiques menées sur les 30 dernières années.
Comme pour chacun de nos articles, même basés sur une documentation possédant une légitimité scientifique, nous appelons à la prise de distance et l’esprit critique quant aux propos retranscrits.
I. Les troubles du comportement, définition et diagnostic
A. Définition
Parmi les troubles du comportement, il convient de distinguer :
– le trouble oppositionnel avec provocation (TOP) ;
– les troubles des conduites (TC).
1) Le trouble oppositionnel avec provocation (TOP) se définit comme “un modèle récurrent ou persistant de comportements négatifs, provocants ou même hostiles envers les figures de l’autorité” (Manuel MSD).
2) le trouble des conduites (TC) est quant à lui “un modèle de comportement récurrent ou persistant dans lequel l’enfant bafoue les droits d’autrui ou les principales règles ou normes sociales liées à son âge” (Manuel MSD). Au sein de cette famille de troubles, on distingue une forme agressive et une forme dite non agressive.
B. Critères cliniques de diagnostic
Le diagnostic de ces comportements pathologiques repose sur divers critères cliniques recensés par le DSM-V au sein de la catégorie des “troubles disruptifs du contrôle des impulsions et des conduites”:
1) Dans le cadre du TOP, quatre des critères ci-dessous doivent se manifester sur une période d’au moins six mois :
a)Humeur colérique et/ ou irritable :
-Fréquemment en colère.
-Fréquemment fâché ou plein de ressentiment.
-Fréquemment susceptible ou facilement agacé par autrui.
b)Comportements de querelle et de provocation :
-Conteste fréquemment les individus en position d’autorité (inclut les parents).
-Embête fréquemment les autres intentionnellement.
-Opposition active ou refus fréquents de se souscrire aux règles et demandes des individus en position d’autorité.
-Repose fréquemment la responsabilité de ses mauvais agissements sur autrui.
-Un esprit vindicatif.
2) Dans le cadre du trouble des conduites, le patient doit avoir présenté trois des symptômes suivants ou plus au cours des douze derniers mois, ou au moins un symptôme au cours des six mois précédents. Il est également précisé que les comportements types doivent être suffisamment prononcés pour affecter le fonctionnement des relations de l’individu avec son environnement :
a)Conduites agressives dans lesquelles des personnes ou des animaux sont blessés ou menacés dans leur intégrité physique
-Brutalise, menace ou intimide souvent d’autres personnes ;
-Commence souvent les bagarres ;
-A utilisé une arme pouvant blesser sérieusement autrui (par exemple un bâton, une brique, une bouteille cassée, un couteau, une arme à feu) ;
-A fait preuve de cruauté physique envers des personnes ;
-A fait preuve de cruauté physique envers des animaux ;
-A commis un vol en affrontant la victime (par exemple agression, vol de sac à main, extorsion d’argent, vol à main armée) ;
-A contraint quelqu’un à avoir des relations sexuelles.
b)Conduites où des biens matériels sont endommagés ou détruits, sans agression physique
-A délibérément mis le feu avec l’intention de provoquer des dégâts importants ;
-A délibérément détruit le bien d’autrui (autrement qu’en y mettant le feu).
c)Fausseté, mensonges ou vol
-A pénétré par effraction dans une maison, un bâtiment ou une voiture appartenant à autrui ;
-Ment souvent pour obtenir des biens ou des faveurs ou pour échapper à des obligations (par exemple « arnaque » les autres) ;
-A volé des objets d’une certaine valeur sans affronter la victime (par exemple vol à l’étalage sans destruction ou effraction, contrefaçon).
d)Violations graves des règles (parentales) établies
-Reste dehors tard la nuit en dépit des interdictions de ses parents, et cela a commencé avant l’âge de 13 ans ;
-A fugué et passé la nuit dehors au moins à deux reprises alors qu’il vivait avec ses parents ou en placement familial (ou a fugué une seule fois sans rentrer à la maison pendant une longue période) ;
-Fait souvent l’école buissonnière, et cela a commencé avant l’âge de 13 ans.
Ces marqueurs comportementaux entraînent une forte altération du fonctionnement social/scolaire/professionnel.
Le DSM V distingue également trois niveaux d’intensité des troubles : léger, moyen, et sévère.
Notons également que pour de nombreux auteurs, le trouble des conduites partage des symptômes communs avec d’autres maladies, d’où une identification parfois difficile, et ce d’autant plus les critères du trouble sont des signes comportementaux peu spécifiques et sont peu informatifs sur le plan étiopathogénique et psychopathologique (par exemple, est-ce que l’agressivité de tel enfant est une réponse à une situation de maltraitance ?). Il est donc nécessaire de prendre en compte le contexte environnemental de l’enfant et de repérer les éventuels troubles psychopathologiques qui pourraient relever d’un traitement spécifique.
Même si les symptômes du TOP et des TC semblent se recouper, il reste important de les distinguer.
Là où le comportement associé au TOP s’articule autour d’une dimension de résistance, d’opposition, en particulier face à des figures d’autorité, les TC sous-entendent l’atteinte répétée aux droits fondamentaux d’autrui et les normes sociales qui les encadrent, avec un aspect prominent de nuisance de son entourage.
Note : au sein de la même catégorie de trouble, le DSM V répertorie également le trouble explosif intermittent, la pyromanie, la kleptomanie, et les troubles disruptifs, du contrôle des impulsions et autres troubles des conduites spécifiés. Nous continuerons cependant de nous concentrer sur les TC et le TOP dans cette article.
II. À la source des troubles du comportement : des pistes multiples
À l’adolescence, le trouble oppositionnel avec provocation touche entre 1 et 2 % des filles de 13 à 18 ans contre 2 et 4 % des garçons du même âge.
Les troubles de la conduite, sous leur forme agressive ou non agressive , touchent entre 2 et 5% des adolescentes et jusqu’à 5 et 9 % des adolescents du sexe opposé (INSERM).
On notera cependant que les statistiques diffèrent de manière conséquente d’une étude à l’autre.
En tant que pathologies multifactorielles, de nombreuses variables entrent en jeu dans le développement de ces troubles.
A. Nous allons exposer par la présente trois axes de prédispositions au développement des TOP et TC :
-l’environnement de l’enfant
-La personnalité de l’enfant
-les facteurs génétiques
1) L’entourage de l’enfant a une forte influence sur le développement de troubles perturbateurs (NB. Les pistes listées ci-dessous, exclusivement tirées d’études scientifiques, restent néanmoins à être prises avec une distance critique.)
Parmi les facteurs favorisant l’apparition de troubles perturbateurs, l’INSERM répertorie donc :
a) avant la naissance
-maternité précoce
-tabagisme, exposition à l’alcool modérée, prise de substances psychoactives pendant la grossesse
b) après la naissance
-complications durant l’accouchement
-prématurité
-faible poids à la naissance
-dépression post-partum de la mère
-traumatisme cérébral durant l’enfance
-parcours scolaire complexe, par exemple marqué par l’échec scolaire
-influence d’un frère ou d’une sœur présentant des troubles perturbateurs
-expositions à la violence par les médias, par exemple les jeux vidéos
-éclatement de la cellule familiale (divorce …), milieu familial déstructuré
-antécédents familiaux de sociopathie
-le phénomène de l’ajustement réciproque “goodness to fit”. En d’autres termes, l’écart conséquent entre le tempérament de l’enfant et les exigences des parents, faciliterait l’apparition de troubles perturbateurs.
-une relation mère-enfant marquée par une instabilité émotionnelle de la part de la mère, provoquerait également des troubles perturbateurs, mais uniquement chez les enfants de sexe masculin.
-attachement désorganisé de type “insecure” aux figures parentales. En cas de présence pendant la petite enfance, ce phénomène est souvent dû à des violences/abus sexuels vécus.
2) La personnalité du patient semble avoir une influence sur l’apparition, le maintien, et l’intensité de la manifestation des troubles du comportement.
Deux des types de personnalité susceptibles de représenter un terrain de prédisposition sont :
-le tempérament difficile
-Le psychoticisme
a) On entend par tempérament difficile un profil présentant les caractéristiques suivantes :
-qualité négative de l’humeur,
-faible persévérance, faible adaptabilité,
-forte distractibilité et réactions émotionnelles intenses,
-niveau élevé d’activité,
-retrait social
Si le tempérament difficile semble être un terrain de prédisposition au développement de troubles du comportement, il favorise l’apparition de troubles mentaux en général.
Les manifestations d’impulsivité, de faible contrôle émotionnel, et d’indocilité, semblent également renforcer la probabilité de développement de troubles perturbateurs.
b) Le psychoticisme se caractérise par :
-une hostilité interpersonnelle
-l’égocentrisme
-une froideur affective
Ces traits de caractère rejoignent en effet l’expression d’attitudes antisociales et de comportements impulsifs, caractéristiques notamment des troubles des conduites.
Plus globalement, il semble que ce soit surtout l’interaction entre un fort besoin d’activation comportementale et une faible inhibition comportementale qui serait prédictive des troubles étudiés dans cet article.
3) Hérédité
En tant que pathologie multifactorielle, les facteurs génétiques ne sont pas à sous-estimer dans l’expression des troubles perturbateurs, dont ils sont capables d’augmenter le risque ou de modifier l’expression.
Par le biais d’une vingtaine d’études de jumeaux , l’héritabilité des troubles externalisés est comprise entre 50 et 60 %, avec :
-50 % d’héritabilité pour les TC
-50 % d’héritabilité pour le TOP.
Cette susceptibilité génétique est inférieure à l’héritabilité du TDA/H, qui oscille entre 70 et 80%

III. Associations de troubles
A. Troubles du comportement et TDAH : quelques chiffres
Répertoriés au DSM V aux côtés du TDA/H (trouble déficit de l’attention / hyperactivité), il est bon d’étudier les rapports de comorbidité entre troubles du comportement et TDA/H, qui cohabitent fréquemment.
Voici donc quelques chiffres :
-84 à 96% des personnes touchées par un trouble des conduites présentent également les symptômes d’un TOP.
Là aussi, les avis des chercheurs divergent, puisque l’étude Greene et coll., 2002 établira que sur l’ensemble des enfants présentant un TOP, seuls 27,7 % présentaient un trouble des conduites.
Il est néanmoins important de rappeler que l’inverse n’est pas véridique, puisque, dans plus de 50 % des manifestations de TOP, un TC n’y sera pas associé (caddra).
-15 à 30 % des profils TDA/H présentent un TOP (Jensen et coll. 2015), tandis que d’autres études affichent une fourchette de 25 à 72 % chez les adolescents, et 12 % chez la population adulte (caddra).
-20 à 25% des personnes TDA/H souffrent de comorbidités anxio-dépressives, symptômes que l’on retrouve également parmi les profil TOP et TC (jusqu’à 41 % pour les troubles anxieux, et 46 % pour les troubles dépressifs, Angold et coll., 1999). L’étude Green et coll. affirme que les patients atteints de TOP présenteraient des comorbidités psychiatriques plus importantes.
En prenant en considération les traits de caractères facilitant le développement de troubles perturbateurs, nous pouvons avancer que les individus présentant un TDA/H sont plus susceptibles de développer des comorbidités de type TOP ou TC.
B. Comorbidités psychiatriques
Il est néanmoins également important de garder en tête que le TOP et les TC augmentent le risque de développement de maladies psychiatriques, la littérature internationale relevant une comorbidité forte et diversifiée :
– Entre 17 à 42% des patients touchés par les troubles perturbateurs seraient également concernés par la maladie bipolaire. Cette association de troubles favorise le développement d’une personnalité dite antisociale à l’âge adulte, ainsi que l’abus d’alcool et de substances psychoactives.
– La dépression (touchant 46 % des patients), lorsqu’elle associée à un profil présentant des troubles perturbateurs, augmente également les risques d’actes suicidaires.
-Quant aux troubles anxieux (touchant 41% des patients), la variante la plus fréquente chez ce type de profils est le stress post-traumatique. En effet, l’impulsivité caractéristique des troubles perturbateurs pousse le patient à se trouver dans des situations plus enclines à provoquer la manifestation d’un syndrome de stress post-traumatique.
– Il est également montré que les troubles du comportement, en raison de la déficience des mécanismes d’autocontrôle et d’inhibition comportementale, peuvent dans certains cas provoquer la manifestation de comportements à risque, tels que : jeux dangereux, sports à risque, prise de risque en véhicules motorisés, boulimie, prise de risque sexuel, conduites de harcèlement, suicides violents.

IV. Pistes de prise en charge
(Note : Cette section est réalisée à partir d’après l’article « Le trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent : une revue des abords thérapeutiques » de D. Perisse, P. Gerardin, D. Cohen, M. Flament, P. Mazet)
Un point essentiel du diagnostic et du traitement de troubles des conduites est la comorbidité : des troubles perturbateurs (TDAH, TOP, TC) coexistent fréquemment (les études divergent quant à la fréquence de cette coexistence). Les troubles anxieux et la dépression y sont également fréquemment associés (30 à 50 %).
Un unique traitement ne peut être efficace dans la prise en charge du trouble des conduites sévères : des interventions multimodales doivent cibler chaque domaine évalué comme dysfonctionnel et doivent prendre en compte l’âge et le contexte social de l’enfant.
Les approches thérapeutiques ont plusieurs fins :
-Amélioration comportementale (diminution des symptômes)
-Protection psychosociale (prise en compte de contexte environnemental)
-Perspective développementale (possible anticipation du devenir au plan des liens affectifs et de l’intégration sociale).
A. Les thérapeutiques psychosociales
En pratique clinique, la majorité des situations est abordée à partir d’approches associant guidance psychiatrique, mesures éducatives, et travail psychothérapeutique (thérapies familiales, de groupe, approches psychodynamiques).
On peut distinguer 3 approches thérapeutiques non pharmacologiques :
1) Les programmes éducatifs parentaux (approches dans lesquelles les parents apprennent à faire changer le comportement de leur enfant à domicile) :
Ces approches répondent à l’idée que de nombreux aspects de la relation parents-enfants favorisent l’apparition de comportements agressifs et antisociaux. Il s’agit alors de développer chez les parents des comportements éducatifs adaptés (touchant par exemple à la question des punitions ou la négociation de compromis).
Ces formations s’appliquent surtout à l’enfant plutôt qu’à l’adolescent et nécessitent une grande implication parentale.
La durée du traitement dépend de la sévérité du trouble (avec une moyenne de 6 à 8 semaines).
Ces programmes ont des résultats positifs d’après les parents et des enseignants, et touchent également positivement les frères/sœurs du patient. Ils peuvent notamment entraîner une normalisation des comportements, autrement dit des niveaux de fonctionnement non clinique.
2) Les thérapies cognitives (entraînement à la résolution de problèmes)
Ces thérapies sont basées sur l’idée que les individus présentant un trouble des conduites ont des déficiences dans différents registres cognitifs (ex : la question de l’attribution, car les enfants agressifs ou violents voient facilement des intentions hostiles chez autrui). Le but est donc de développer chez l’enfant des aptitudes à résoudre les conflits.
L’accent est mis sur la façon d’apprécier les situations, ainsi que la suggestion (et le renforcement) de comportements adaptés, le tout au moyen d’exercices structurés (ex : de la fiction à la vie réelle). Le thérapeute a un rôle très actif auprès de l’enfant et l’aide à trouver des solutions lui-même.
Les psychothérapies jouent un rôle dans la diminution des comportements antisociaux et agressifs et sont plus adaptées aux adolescents.
3) Les approches multisystémiques (visent à atténuer les facteurs de risque et mettre en valeur les forces de l’individu et de sa famille) :
Elles ont recours à deux théories : la théorie générale des systèmes (le comportement d’un individu est déterminé par son interaction avec les systèmes dans lesquels il évolue) et la théorie de l’écologie générale (les précurseurs et corrélats de ce comportement relèvent des traits individuels et familiaux et de la dynamique des relations avec les pairs).
Leurs caractéristiques principales sont : des séances en communauté (par exemple à domicile, et non dans un cabinet), un contact quotidien, surtout au début de la thérapie (le thérapeute devient plus responsable, tandis qu’une thérapie plus traditionnelle fait du patient le principal responsable des résultats), donnant lieux à des évaluations quotidiennes des progrès. La durée est limitée à l’atteinte des objectifs fixés avec la famille.
Ces thérapies ont été pensées dans le cadre des services de santé mentale pour les délinquants juvéniles, ce qui atteste d’une certaine efficacité pour un type de population présentant un trouble de conduite sévère. Leur présupposé (les troubles de l’attitude ont une origine multiple) correspond par ailleurs avec la réalité clinique. En revanche, on peut leur reprocher de combiner beaucoup d’approches différentes et donc de nécessiter des thérapeutes bien formés auxdites approches et très disponibles.
B. Les thérapies multisystémiques
Pour l’instant, aucun traitement n’est indiqué officiellement dans ce trouble par les agences du médicament en Europe et aux États-Unis (à l’exception de certains traitements associés à d’autres troubles).
On peut distinguer trois classes de psychotropes utilisés :
1) Les thymorégulateurs
Principalement indiqués dans le cadre du trouble bipolaire chez l’enfant et l’adulte, ils peuvent s’avérer intéressant pour l’enfant ou l’adolescent dans le traitement des conduites agressives sévères et prolongées.
Le lithium (la molécule qui a été le plus étudiée) représente pour certains patients un risque toxique trop important et être refusé par le patient. La littérature est contrastée, mais les études plus récentes démontrent une efficacité du lithium sur l’agressivité, avec des effets à court terme moins grands que les neuroleptiques (les études sur les effets à long terme sont contradictoires).
2) Les neuroleptiques
Dans la pratique clinique, ce sont les médicaments les plus utilisés chez les enfants et adolescents présentant des troubles du comportement de type agressif. En dépit d’un faible nombre d’études, ils montrent des résultats positifs (par opposition à l’administration d’un placebo), mais entraînent des risques d’effets secondaires à court terme et de dyskénie tardive, bien qu’il faille à ce sujet distinguer les neuroleptiques classiques des neuroleptiques récents dits atypiques. Dans le cas des neuroleptiques récents, les nouvelles molécules ne sont pas autorisées pour un sujet de moins de 15 ans sans retard mental ou autisme.
Selon certains auteurs, ces médicaments devraient être réservés aux cas d’agressivité majeure.
3) Les psychostimulants
Les études ont surtout concerné des sujets présentant un TDAH comorbide d’une composante agressive ou antisociale. On constate une diminution des symptômes d’agressivité, attribuée à une réduction de l’impulsivité, un trait commun aux deux troubles – mais le risque d’addiction les rend toutefois moins indiqués.
4) Autres molécules utilisées
– La clonidine montre un effet sur les symptômes agressifs, surtout avec THDA.
– Les bêtabloquants sont peu concluants (risques et effets secondaires)
– On a aussi utilisé des antidépresseurs (du fait de l’association courante entre dépression et trouble des conduites), notamment à base de sérotonine. De manière générale, il est difficile de montrer leur efficacité en-dehors d’une comorbidité dépressive et leur indication chez l’enfant et l’adolescent est controversée.
C) Autres pistes
1) Des réseaux pluri-professionnels et de structures partenariales : il s’agit d’élaborer des modalités de traitement et d’accompagnement tenant compte des enjeux thérapeutiques et judiciaires et de soutenir les professionnels.
Parmi ces structures :
a) Des lieux d’accueil spécifiques pour les adolescents. Ces lieux sont médicalisés (comme la MDA, Maison des adolescents qui agit au niveau départemental pour coordonner les soins) ou non (comme les PAEJ, Points d’accueil et d’écoute Jeunes).
b)Des actions de prévention et de soin organisées par le secteur de psychiatrie infanto-juvénile. Ces actions sont coordonnées sur un territoire donné à partir de différentes structures sectorielles. Les ressources et les méthodes thérapeutiques peuvent varier d’un service à l’autre (par exemple selon la participation de pédopsychiatres de secteur au Conseil local de santé mentale). Des soins sont proposés aux enfants dans une perspective de prévention et de traitement ; ils ont pour but d’amener les patients à s’exprimer sans avoir recours à des actes agressifs, et sont dispensés en ambulatoire ou en institution.
2) En ce qui concerne l’aménagement et l’orientation scolaires :
a)Les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) proposent des médiations individuelles ou en groupe dans le but de faciliter l’adaptation des élèves au milieu scolaire.
b) On trouve également des structures d’enseignement spécialisé: intervention d’un médiateur ou accueil temporaire sur un espace relais : R’école 1 & 2), un Service d’éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD) pour les élèves du primaire et du collège ou un Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP).
Ces deux dernières structures dépendent du champ médico-social et exercent une aide différente, l’une favorisant les interventions à l’école/au domicile (SESSAD), l’autre privilégiant l’accueil d’enfants et d’adolescent au sein de l’institution, en internat ou externat (ITEP) ; dans les deux cas, l’orientation d’un patient vers ces structures requiert un certificat médical et une validation par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées.
c) Des classes et ateliers relais (liés à l’Éducation nationale et à la Protection judiciaire de la jeunesse) proposent des accueils temporaires aux collégiens et lycéens en décrochage scolaire, afin de favoriser la re-scolarisation et la socialisation des adolescents.
On peut récapituler la question de la prise en charge du trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent ainsi :
– Prise en charge de la crise : hospitalisation, adaptation de l’environnement, et, en cas d’une crise trop sévère/persistance, prise de neuroleptiques.
– Évaluation de la psychopathologie du patient et de son contexte psychosocial : environnement familial et social, niveau scolaire, traitements antérieurs, comorbidités…
– Discussion de la légitimité de l’intervention (psychosociale et/ou judiciaire) et choix d’une intervention correspondant au profil du patient et de sa famille (enfant, adolescent, gravité des cas).
– Possibilité d’un traitement médicamenteux si le trouble des conduites persiste ou dans le cas d’une pathologie psychiatrique comorbide faisant l’objet d’un traitement, le tout en s’assurant, avant de la prescription, de l’accord du patient (et de sa famille) ainsi que de la nature et gravité des symptômes visés. Vient ensuite le choix d’une molécule, sachant que le patient doit être tenu informé des effets secondaires.
– Tout ceci se fait en poursuivant/reprenant le travail psychothérapique et psychosocial et en soutenant la famille concernée.
En conclusion, on constate qu’aucune intervention seule ne peut infléchir le diagnostic péjoratif du trouble à long terme. La prise en charge du trouble des conduites doit donc être définie après une évaluation psychopathologique de l’enfant mais également de son contexte : évaluation de troubles psychiatriques présents, du contexte familial et social, de difficultés instrumentales (comme la dyslexie), de déficits cognitifs et de problématiques affectives.
La plupart des thérapies mettent l’accent sur les interactions familiales (même en milieu clinique) de même que le travail psychothérapeutique avec le patient. Par conséquent, si les médicaments peuvent être indiqués pour certains cas sévères et généralement à court terme, il est essentiel de les associer à une prise en charge psychosociale. Enfin, comme on constate que les hospitalisations et/ou placebo présentent beaucoup d’effets à court terme, on peut envisager le cadre médical institutionnel comme une étape importante dans le parcours des enfants et adolescents présentant un trouble de l’attitude.
Contacts utiles :
• Action sociale : http://www.annuaire.action-sociale.org
• Association nationale des Maisons des adolescents – ANMDA :
http://www.anmda.fr
• Association nationale des Points écoute jeunes : http://www.anpaej.fr • Centres médico-psychologiques : Pages jaunes
Élaboration de la brochure
• Ministère de l’éducation nationale : http://www.education.gouv.fr • École des parents et des éducateurs (EPE)
http://www.ecoledesparents.org
Lignes d’écoute :
• Allô Grands Parents (EPE) – 01 44 93 44 90
• Ecoute famille Unafam – 01 42 63 03 03 / http://www.unafam.org • Inter service parents (EPE) – 01 44 93 44 93
Bibliographie :
Manuel MSD en ligne (msdmanuals.com)
Expertise collective, Trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent, Inserm, Paris, 2005, 56 p. (http://dcalin.fr/fichiers/inserm2.pdf) CADDRA (Candadian ADHD Resource Alliance), Lignes directrices canadiennes sur le TDAH, troisième édition, Toronto, 2011 (Cliquer pour accéder à fr_caddraGuidelines2011.pdf)
D. Perisse, P. Gerardin, D. Cohen, M. Flament, P. Mazet, « Le trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent : une revue des abords thérapeutiques », Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, Volume 54, Issue 8, décembre 2006, p. 401-410 (http://speapsl.aphp.fr/pdfpublications/2006/2006-3.pdf)
A. Caria, S. Bonneton, C. Loubières, « Troubles des comportements chez l’enfant et l’adolescent », Psycom, Paris, 2018, 15 p. (Cliquer pour accéder à Troubles-des-comportements-enfant-ado-2018.pdf)